titre : "Les Rongeurs d'arbres" de Max Jacob.
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"Les Rongeurs d'arbres" de Max Jacob.
Les Rongeurs d'arbres
Isolé, ou emprisonné, ou travaillant, Alexandre Dumas père se consolait avec l'odeur d'un vêtement de femme. Trois hommes pareils, même chapeau rond, même petite taille, se rencontrèrent étonnés d'être si pareils et se devinèrent une pareille idée: voler la consolation de l'isolé.
Max Jacob, Le Cornet à dés.
notes en désordre
Cette transparence mystérieuse des poèmes en prose de Max Jacob dans Le Cornet à dés joue ici à plein. Une forme d'humour aussi, à la Buster Keaton, qui va de pair avec une angoisse souterraine.
Comme souvent chez lui, le poème est un court récit (alternance du passé simple et de l'imparfait.) Il raconte, apparemment, un vol. Celui de la "consolation" d'Alexandre Dumas. Dans la perspective catholique qui est celle de Max Jacob, on peut avancer l'hypothèse que le vol de la consolation représenterait une perte essentielle pour l'artiste qui prend sur lui les péchés du monde et, comme le Christ, connaît une solitude radicale et même l'emprisonnement après le Jardin des oliviers dans son "travail" pour sauver les hommes.
Qui est volé? Dumas. C'est l'artiste, l'écrivain, qui est aussi une figure d'une certaine culture populaire à laquelle est sensible Max Jacob (cf ses poèmes sur Fantômas dans Le Cornet à dés.) Il s'oppose point par point aux trois voleurs. Il est seul ("isolé"), il est prisonnier, réellement ou symboliquement dans sa création, il crée (en "travaillant"). Cette situation douloureuse demande une consolation. Le vêtement de femme, son odeur, représentent la consolation. Une consolation qui renvoie au sexe, ou au moins à la sensualité. L'artiste est vite enfermé dans l'abstraction (l'emprisonnement, encore une fois.) Il a besoin de concret pour retrouver une présence réelle, même si cette présence n'est plus qu'une trace de présence (vêtement, odeur), afin ne pas se perdre lui-même tout entier. Noter la forme de l'anecdote littéraire (probablement fictive?).
Qui vole? Trois hommes. Le chapeau rond des voleurs pourrait faire penser au lecteur d'aujourd'hui aux hommes en chapeau melon de Magritte, même si Jacob, à cette date, n'a pas pu connaître ces tableaux. Le fait qu'ils soient trois renvoie peut-être aussi au fabliau médiéval des Trois Larrons. C'est par eux que l'anecdote littéraire fantaisiste se transforme en récit. En se rencontrant, ils prennent conscience de leur identité parfaite et donc de leur banalité. Insistance sur le "même" et le "pareil" dans le texte. Leur prise de conscience est d'ailleurs involontaire, informulée ("étonnés", "se devinèrent." ) L'opposition avec la figure de Dumas est complète. Dumas est unique, pas eux, ils sont "petits" (à prendre de manière polysémique), ce qui renvoie de manière implicite à la grandeur de l'artiste (l'"arbre" du titre).
Il y a donc jalousie, envie, d'où l'idée du vol qui pourrait peut-être, par une sorte de réflexe qui est de l'ordre de la pensée magique, leur donner un peu du génie de Dumas, de son individualité même malheureuse. Voler le vêtement de femme, son odeur, pourrait leur permettre d'acquérir le génie de l'artiste mais surtout de sortir d'un isolement ressenti, informulé. Hypothèse: le vol ne changerait rien, la solitude des hommes de "même petite taille", des "rongeurs" n'est évidemment pas de la même nature que celle de Dumas. C'est la solitude paradoxale de l'homme moderne quand il pressent qu'il n'a rien d'unique, qu'il est fabriqué dans le même moule et obéit instinctivement aux mêmes codes (ici vestimentaires).
Le vol: A-t-il vraiment lieu? La conclusion de Jacob est formulée de manière ambiguë. Sommes-nous dans l'intention, "l'idée" ou le vol est-il accompli ? Le vol serait d'autant plus facile que Dumas est à la fin désigné par le même mot qu'au début, "isolé", dans une épanadiplose qui clôt de manière circulaire le poème et le résume, encore une fois, à une opposition entre la solitude vulnérable de l'artiste et le nombre des hommes de "même petite taille" tout en insistant sur cette solitude scandaleuse pour le groupe. Dumas n'est plus désigné par son nom. Pour les trois voleurs, il est avant tout "l'isolé".
Cela fait alors apparaitre le rapport, à priori inexistant, entre le titre "Les Rongeurs d'arbres" et le poème. Voler un artiste, c'est d'abord le repérer puis le ronger, saper ses bases, l'user progressivement pour qu'il s'effondre. Le titre, à la lumière du texte, devient métaphore. Les voleurs sont les rongeurs, l'arbre est l'artiste.
Si on examine ce rapport entre le titre et le texte, le poème trace implicitement les contours et la vraie nature de ce conflit artiste/ foule ou artiste/hommes banals qui finalement souffriraient de leur banalité sans en avoir conscience. Il ne s'agirait donc pas seulement, à travers ce vol du vêtement de femme, de s'approprier le génie de l'artiste que de détruire , à la manière des "rongeurs", des rats, la scandaleuse individualité de Dumas. Comme celle du Christ qui s'est fait homme mais donne de l'homme une version inatteignable (parce que le Christ reste en même temps de nature divine.), ce qui amène les hommes "petits" à le crucifier.
ainsi, l'article "Les Rongeurs d'arbres" de Max Jacob.
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